Semences : un «baromètre céréales» instructif

Publié le 10 mai 2017

Depuis quelques années, à la demande de sa section Céréales à paille et Protéagineux, le GNIS organise, en région, des réunions dédiées aux distributeurs de semences. Celle du GNIS Sud-Ouest s’est tenue à Toulouse, le 19 avril 2017. L’occasion pour des représentants de coopératives, de négociants, mais aussi des agriculteurs, de découvrir la dernière enquête que l’interprofession des Semences et Plants a menée auprès de quelques-uns de ses producteurs.

Comparatif semences certifiées/graines de ferme

C’est par un questionnaire téléphonique d’une vingtaine de minutes que le GNIS consulte, chaque année, plusieurs centaines d’agriculteurs, dans la première quinzaine de décembre. Ce sondage compare le ressenti des utilisateurs entre semences certifiées et graines de ferme. Le « Baromètre céréales » 2016 portait sur un panel de 604 producteurs de toute la France, utilisateurs stricts ou mixtes des deux solutions. Pour être comparable à l’échelle nationale, le questionnaire portait en priorité sur la culture de blé tendre.

Premier constat, après une campagne jugée très mauvaise par les enquêtés, le nombre de céréaliers utilisateurs de graines de ferme a augmenté entre les semis de 2015 et ceux de 2016. Si quelques-uns sont passés d’un système uniquement en certifiées à une utilisation mixte (47% des sondés en certifiées et 39% en mixte en 2016), le transfert s’est surtout fait chez les utilisateurs mixtes qui sont passés à une solution uniquement en graines de ferme. Ces derniers représentent 14% des sondés. Principale raison invoquée : le prix des semences, jugé trop élevé dans un contexte de trésoreries dégradées, pour 62% des sondés. Paradoxalement, les densités de semis ont augmenté en 2016 pour les graines de ferme (346 grains/m² contre 296 en certifiées). « Les densités n’ont pas changé en semences certifiées par rapport à 2015 », souligne Julien Constant, secrétaire général de la section « Céréales à paille » du GNIS. « Nous y voyons le signe que leurs utilisateurs ont confiance dans leurs qualités germinatives, même en situation tendue. » Autre point notable, les utilisateurs de graines de ferme ont, pour près de la moitié d’entre eux, fait leur triage eux-mêmes. Un chiffre en hausse de 36%, quand le recours à un trieur à façon indépendant a baissé de 14% pour concerner un quart des enquêtés. Si la recherche d’économies est une des raisons de ce constat, le GNIS met aussi en avant que nombreux étaient les trieurs à façon à ne pas avoir anticipé l’afflux de demandes et n’ont donc pas été en mesure de répondre aux sollicitations.

Réduire l’écart de prix

Gérard Crouau, délégué général du GNIS Sud-Ouest.
Gérard Crouau, délégué général du GNIS Sud-Ouest.

Plus inquiétant selon le GNIS, peu d’utilisateurs de graines de ferme savent exactement ce qu’ils sèment. 45% de ceux qui trient les graines eux-mêmes font une analyse du Poids Mille Grains (PMG) et/ou de la Faculté Germinative et/ou du Poids Spécifique. Pour ceux qui recourent à un trieur à façon, si 60% disposent d’une analyse du PMG, seuls 14% reçoivent une analyse de Faculté Germinative. « Ce n’est même pas 1/6 des producteurs », s’exclamait Gérard Crouau, délégué général du GNIS Sud-Ouest. « Et même pour le triage à la ferme, plus de la moitié ne connaissent pas la valeur de ce qu’ils sèment. Et que dire enfin des 32%, soit un tiers, qui ne fait pas la moindre analyse chez eux ou par le triage à façon ? » Dans un contexte où la qualité et l’homogénéité des productions reste le meilleur atout des céréaliers français face à la concurrence internationale, la filière Semences s’interroge sur les capacités des agriculteurs français à conserver cet avantage. « La semence certifiée coûte plus cher, c’est un fait », reconnaît Gérard Crouau. « Mais l’écart, au final, n’est pas si important que cela si l’on prend en compte le coût du triage et le taux de levée moins important. Ceci dit, nous sommes conscients que le prix peut être un frein dans les années difficiles comme celles que nous traversons. Même si les semenciers travaillent avec des marges réduites, il faut continuer à travailler à contenir les prix. »

Reste qu’il existe des dispositifs d’aide à l’achat de semences certifiées mises en place par des distributeurs ou, comme dans l’Ile de France, par le Conseil Régional. Toutefois, si le cas de l’Ile de France a été médiatisé auprès du monde agricole, seuls 9% des sondés du Baromètre Céréales ont bénéficié des mécanismes proposés par les distributeurs, faute d’information. Le GNIS convient qu’une meilleure communication doit être mise en place au sein de la filière, pour informer les producteurs des solutions qui leur sont proposées. « Il faut aussi que chacun joue le jeu », ajoutait en aparté un producteur de semences du nord toulousain. « Je n’utilise que des semences certifiées par ce que je m’y retrouve en qualité, mais aussi parce que nous avons besoin que la recherche génétique continue pour proposer des variétés toujours plus adaptées qui, in fine, profiteront aussi à ceux qui font du triage. Quant au prix, le distributeur à qui j’achète ma semence l’indexe sur les cours des céréales, quand d’autres gardent toujours le même, quelle que soit la situation. On doit tous faire des efforts. »

 

Auteur de l’article : Sébastien Garcia