Front uni contre la politique budgétaire de l’État

Publié le 30 septembre 2014

Malgré la période de travaux agricoles fort peu propice aux réunions, la Chambre d’Agriculture a convoqué une session extraordinaire de son assemblée plénière, le 12 septembre dernier, à Toulouse. À l’ordre du jour, les décisions très inquiétantes du Gouvernement, qui a annoncé, le 8 juin, la ponction de 100 millions € sur les fonds de roulement des Chambres d’Agriculture ainsi qu’une diminution de leurs ressources liées à la Taxe sur le Foncier Non-Bâti (TFNB) pour les années 2015 et suivantes. Pour la Haute-Garonne, cela représente une diminution de 2 millions € sur le budget 2015-2017…

Des projets nécessaires…

Même si le bureau de la Chambre d’Agriculture de Haute-Garonne accepte qu’elle participe à l’effort national de redressement des comptes publics, cette annonce et surtout ses modalités sont calamiteuses pour son budget. De fait, les pouvoirs publics prévoient de faire un prélèvement systématique sur les fonds de roulement des Chambres d’Agriculture au-delà de 90 jours de fonctionnement. Or depuis 2007, la Chambre d’Agriculture travaille à autofinancer 2 importants projets immobiliers, tout en assurant la même qualité de service aux agriculteurs du département. L’immeuble abritant la Chambre d’Agriculture de Toulouse date des années 70. Très mal isolé, avec beaucoup d’espace perdu et ne répondant plus aux normes d’accueil actuelles, il constitue un vrai gouffre financier en termes d’entretien et de chauffage. En outre, y accéder est peu aisé pour les agriculteurs haut-garonnais, compte-tenu de sa situation en centre-ville. La meilleure solution consistait donc à vendre cet immeuble, détenu en copropriété avec la MSA, et acheter un terrain en périphérie de la ville pour y construire un bâtiment basse-consommation mieux adapté aux usagers, salariés et exploitants. L’antenne de St Gaudens de la Chambre d’Agriculture doit aussi être revue. Mal conçu, le bâtiment/hall d’exposition situé à l’entrée doit être entièrement réhabilité pour en faire des bureaux et salles de réunion. Les travaux doivent d’ailleurs débuter en octobre prochain. Se refusant à recourir à l’emprunt pour financer ces investissements nécessaires, la Chambre d’Agriculture a mis en place une politique de maîtrise des coûts et de développement de ses recettes, accompagnée d’une politique rigoureuse d’amortissements, de provisions et de mise en réserves systématique des résultats. Des réserves dans lesquelles le Gouvernement compte bien piocher…

… soudainement remis en cause

Cette « ponction » sur les fonds de roulement ne se fera qu’une seule fois, et sera calculée sur les résultats à fin décembre 2013. Mais ce qui inquiète fortement la Chambre d’Agriculture, c’est que le Gouvernement refuse la réalisation de ces travaux prévus de longue date. « Ces investissements n’ont pas été décidés du jour au lendemain, après l’annonce du Premier Ministre, pour diminuer notre résultat et moins reverser d’argent à l’État », insiste Charles Tapie, directeur de la Chambre d’Agriculture 31. « C’est l’aboutissement d’un projet réfléchi, de longue haleine et dont la finalité n’est autre que de faire des économies considérables. Lesquelles déboucheront sur de l’emploi, que ce soit dans le BTP pour les travaux à venir ou, à plus long terme, en consolidant et pérennisant nos équipes sur le terrain. » Mais pour le Bureau de la Chambre d’Agriculture, l’État semble plus pressé de se renflouer en argent frais que de regarder la portée économique à 5 ans des projets mis en place. Preuve supplémentaire, s’il en était encore besoin, la Chambre consulaire prévoyait, cette année, de rembourser par anticipation l’ensemble de ses emprunts. Alors qu’elle paye 40.000 € par an d’intérêts au titre des emprunts à long et moyen terme souscrits, ce remboursement anticipé lui permettrait d’économiser chaque année l’équivalent du salaire d’un Temps Plein. Cette décision, prise dans une logique de sauver des emplois et de bonne gestion, lui est pour le moment refusée par son ministère de tutelle…

Motion unanime

Il fallait donc présenter à l’assemblée plénière de la Chambre d’Agriculture les impacts de la nouvelle politique du Gouvernement et faire valider un nouveau budget en conséquence. Présent lors de la session, Philippe Kahn, le directeur départemental des territoires (DDT), a du se contenter d’écouter les débats. En raison des élections sénatoriales, motif de l’absence du Préfet, il était de fait tenu à un devoir de réserve. Il aura tout de même pu constater un fait inhabituel. Suite à la présentation de la situation, l’ensemble des membres de l’assemblée a décidé de rédiger une motion, refusant d’une même voix que les projets de la Chambre d’Agriculture soient compromis par une décision gouvernementale hâtive et inique. Si la baisse des ressources pourra être absorbée, au prix d’une gestion encore plus rigoureuse et d’abandon de quelques projets, la réalisation des travaux prévus n’est pas négociable. Une unanimité qui confirme bien le danger de ce passage en force des Pouvoirs Publics pour la pérennité d’un organisme au service de l’ensemble des agriculteurs.


La colère d’Yvon Parayre
« On punit les bons élèves »

Depuis deux mandatures, la Chambre d’Agriculture a modernisé ses services, optimisé ses coûts tout en répondant aux besoins des agriculteurs et préservé l’emploi en intégrant des structures en son sein (STPL, Bovins Croissances…). Elle a assaini ses finances et s’est constitué des réserves lui permettant d’autofinancer des projets destinés à la rendre encore plus performante.
Et aujourd’hui, nous sommes punis. Punis d’avoir trop bien géré notre organisme. Puni d’avoir anticipé des dépenses nécessaires. Punis de nous être tournés vers l’avenir alors que nous aurions pu ne rien faire et rester financièrement sur la corde raide. Ce Gouvernement a décidé de ponctionner les Chambres Consulaires les plus performantes, au risque de gravement les déstabiliser, quand celles qui sont restées dans l’immobilisme ne seront pas impactées, voire seront approvisionnées par les « bons élèves ».
Quel message doit-on comprendre ? Quels enseignements doit-on en retirer ? Que les Pouvoirs Publics privilégient le nivellement pour le bas ? Qu’ils préfèrent prendre tout de suite plutôt que de plus gagner demain ? Alors que la révision du zonage de la Directive Nitrates menace de réduire à néant deux années de réunions et de travail des élus et salariés des Chambres d’Agriculture, ce Gouvernement compte également saborder ce beau bateau pour une politique à courte vue. C’est inacceptable !
Je remercie sincèrement tous les représentants de l’assemblée plénière, qui ont su se libérer pour cette session extraordinaire en pleine période de travaux, pour leur soutien unanime et leur solidarité face à cette décision inique. C’est en faisant front collectivement que nous aurons une chance de faire comprendre à l’administration qu’elle doit nous faire confiance.

Auteur de l’article : Sébastien Garcia