BSV Arbo, la sentinelle des productions arboricoles

Publié le 9 mai 2016

Jean-Louis Sagnes n’a pas vraiment le temps de s’ennuyer. Ce technicien de la Chambre d’Agriculture du Tarn-et-Garonne est, en effet, expert filière du réseau national de fermes DEPHY, pour tout ce qui concerne l’arboriculture. Parallèlement, il assure, avec ses collègues Nathalie Rivière et Marie Dordolo, l’animation d’un réseau de techniciens de plusieurs organismes (Chambres d’Agriculture, Organisations de Producteurs, coopératives…) travaillant dans le grand Sud-Ouest (Midi-Pyrénées, Aquitaine, Limousin, Poitou). Dans ce cadre, ils éditent chaque année le guide « Arboriculture Sud-Ouest », qui synthétise les préconisations phytosanitaires et les différentes alternatives, chimiques ou non, pour toutes les espèces fruitières de ce territoire. Et Jean-Louis est enfin l’animateur de la partie « Fruits à pépins » du Bulletin de Santé du Végétal Arboriculture.

Une équipe diversifiée…

Quand le Bulletin de Santé du Végétal a été lancé, en 2010, la Chambre Régionale d’Agriculture et le SRAL* ont fait le choix de confier l’animation des différents BSV à des spécialistes de chaque filière. En tant que « Monsieur Arbo » reconnu et animateur technique, Jean-Louis Sagnes était donc tout indiqué pour cette tâche. D’autant qu’avec une quinzaine de techniciens de la région, ils avaient déjà pris l’habitude de s’appeler au téléphone tous les mardis matin pour faire un point sur les cultures qu’ils suivaient et étudier ensemble les préconisations possibles en fonction de la pression parasitaire. « Nous avions déjà une façon de travailler bien rodée », résume-t-il. « Nous sommes donc passés d’un bulletin informel à un BSV plus abouti, plus complet et officiellement reconnu. » Pour fonctionner, Jean-Louis Sagnes s’appuie sur deux équipes. La première, réduite, est constituée de Marie Dordolo, en charge des fruits à noyau (prune, pêche, cerise), et de techniciens du Cefel**, de la coopérative Qualisol, de la Chambre Régionale d’Agriculture et du SRAL. Ils se chargent de « dégrossir » le travail pour préparer, en amont, une ébauche de bulletin. La seconde équipe intègre, en plus, des techniciens de toutes les Organisation de Producteurs régionales, des Chambres d’Agriculture du Tarn et Tarn-et-Garonne, et du Conseil Départemental 31. C’est ensemble qu’ils procèdent à la synthèse de toutes les données disponibles pour finaliser le BSV arboriculture final.

… sur un réseau de surveillance dense

« Une grosse part de notre travail concerne le suivi de la tavelure, car cette maladie génère la majeure partie des traitements sur pommiers », explique Jean-Louis Sagnes. « Nous avons donc mis en place un réseau de parcelles fixes et flottantes, qui viennent compléter les suivis biologiques réalisés en laboratoire par le Cefel et la FREDON***. » Au total, le réseau BSV Arboriculture compte une cinquantaine de parcelles fixes de référence et une centaine de pièges relevés tous les lundis par des techniciens et des producteurs, pour alimenter une base de données pluriannuelle conçue par la Chambre d’Agriculture 82. Les parcelles « flottantes » sont celles visitées par les techniciens de la région lors de leurs différentes missions. « Les 15 techniciens de l’équipe BSV en voient chacun une cinquantaine par semaine dès le début de la saison », précise Jean-Louis Sagnes. « Cela nous donne donc une vision très large des risques ravageurs/maladies, qui ne seraient pas forcément présents dans les parcelles fixes. »

Le réseau BSV Arboriculture fonctionnait jusque-là avec les données météorologiques de Météo-France. À compter de cette année, il va travailler avec un réseau de stations implantées, pour la plupart, chez des agriculteurs du réseau DEPHY animé par la Chambre d’Agriculture 82. Si ces stations sont concentrées dans le Tarn-et-Garonne, c’est que ce département produit à lui seul 90% des pommes de Midi-Pyrénées. Ce réseau de stations va ainsi permettre un maillage plus fin, avec des données très contextualisées pour optimiser les interventions phytosanitaires en zones arboricoles.

Planning minuté

De fin février à début juillet, un bulletin est édité chaque semaine. À partir de juillet, les parutions deviennent bimensuelles, avant de s’arrêter vers la fin septembre, pour reprendre en février suivant. Pendant ces périodes d’activités, Jean-Louis Sagnes consacre tous ses lundis et mardis matin au BSV. Il recueille tout d’abord les données fournies par les laboratoires, pour la tavelure et acariens, et recueillies dans les parcelles fixes et par les piégeurs, pour les ravageurs comme la tordeuse. Avec les membres de l’équipe resserrée, il établit une ébauche de bulletin en fin de journée. Le mardi matin est, lui, très minuté. De 8 à 9h, il fait le point des observations et relevés des parcelles flottantes avec tous les partenaires. Ensemble, ils arrêtent les points clés du bulletin. De 9 à 10h, il rédige le BSV Arboriculture qu’il transmet, dans la foulée, à la Chambre Régionale d’Agriculture. À midi, le bulletin est mis en ligne sur les sites internet de la Chambre Régionale et de la DRAAF, et envoyé par mails aux producteurs et techniciens abonnés. « Le BSV est un outil de construction du conseil technique, dont découleront des préconisations d’interventions », rappelle Jean-Louis Sagnes. « Cette mutualisation du travail et des observations des techniciens de différents organismes est un vrai atout pour l’utilisateur final. Mais nous souhaitons aller plus loin. Le BSV va continuer d’évoluer. Il sera toujours plus réactif, au plus près des besoins des producteurs. Avec les nouvelles technologies de communication, pourquoi ne pas imaginer un service personnalisé directement sur son ordi ou son smartphone ? C’est un service qui a beaucoup de potentiel. »

 

* Service Régional de l’ALimentation, dépendant de la DRAAF
** Centre d’Expérimentation en Fruits et Légumes de Midi-Pyrénées
*** Fédération RÉgionale de Défense contre les Organismes Nuisibles

 

 

L’avis de…

 

Yvon Parayre, Vice-Président de la Chambre d’Agriculture LRMP, en charge du dossier Écophyto

« Le Ministre de l’agriculture a dévoilé les orientations du plan Écophyto 2 en octobre 2015. Parmi les actions construites dans le cadre du premier plan, le dispositif « BSV » est pérennisé comme vecteur d’informations essentiel en matière de protection des cultures. Il sera même renforcé pour améliorer son impact en faveur d’une meilleure utilisation des produits phytosanitaires. Il devra, par exemple, mentionner les méthodes prophylactiques permettant de limiter la sensibilité de nos productions aux bioagresseurs, mais aussi les méthodes alternatives quand elles sont fiables et réalisables. Il devra aussi renforcer sa capacité prédictive, en utilisant les modèles épidémiologiques issus de la recherche et de l’expérimentation.

Pour y parvenir, la Chambre Régionale d’Agriculture s’appuiera sur le large partenariat d’acteurs construit pour l’élaboration du BSV (chambres départementales, coopératives, négoces, organisations de producteurs, instituts techniques, FREDON…), dans le souci permanent d’apporter aux producteurs une vision précise des risques sanitaires pour leurs cultures. »

Jean-Jacques Lantourne, responsable technique de la SICA Quercy-Lomagne

« Chaque semaine, j’assiste à une réunion technique de la Coordination Fruitière, qui regroupe les techniciens de toutes les organisations de producteurs du Tarn-et-Garonne. Ensemble, nous nous basons sur les observations du dernier BSV Arboriculture que nous comparons avec celles que nous faisons sur le terrain. Cela nous permet de rédiger un bulletin de préconisations propre à chacune de nos structures respectives. En tant qu’organisation de producteurs, nous n’avons pas de prétentions commerciales, aussi le BSV nous aide à nous concentrer uniquement sur le conseil technique. Le Bulletin de Santé du Végétal Arbo présente plusieurs avantages. Tout d’abord, il nous permet de rester informés et de ne pas nous laisser surprendre par l’évolution de maladies que nous n’aurions pas encore prises en compte car ne concernant pas encore nos zones. Ensuite, sa diffusion au niveau régional permet d’uniformiser la lutte contre les ravageurs. Là encore, on y gagne en réactivité. Enfin, la disponibilité du BSV sur internet permet à un agriculteur curieux ou non inscrit à un bulletin de préconisation de se tenir informé, là où il fallait auparavant un abonnement payant aux Avertissements Agricoles. »

Jean-Pierre Garrigues, responsable commercial Vitivista pour Midi-Pyrénées

« Vitivista est un négoce agricole dont les activités s’étendent des Charentes au nord toulousain. Dans d’autres régions, Vitivista participe à la rédaction des BSV. Mais avec les experts déjà présents en Midi-Pyrénées, les compétences sont largement suffisantes. Comme nous sommes spécialisés en viticulture, arboriculture, maraîchage et grandes cultures, nous sommes donc abonnés à tous les BSV qui concernent nos activités. Par exemple, même si nous n’avons que quelques producteurs de noisettes chez nous, le BSV nous permet d’être aussi pertinents dans nos conseils que pour les autres productions plus répandues. Je m’en sers donc quasiment tous les jours, pour établir mes préconisations d’intervention. À cette époque de l’année, je surveille grâce à lui les premiers vols de tordeuses et carpocapses, pour évaluer la date de début de lutte contre ces papillons. L’autre avantage de ce bulletin est de pouvoir me tenir informé des nouvelles normes et réglementations. Comme tout peut changer très vite, le BSV me sert à ne rien rater de ce qui touche à mon métier au quotidien. »

 

 

 

 

Auteur de l’article : Sébastien Garcia

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