Sauver le lait du dépôt de bilan…

Publié le 25 février 2011

Salle comble lors du colloque Lait, organisé par la Chambre régionale d’agriculture de Midi-Pyrénées, le 8 février dernier à Saint Gaudens. Il faut dire que la filière n’en finit plus de traverser une crise conjoncturelle et structurelle, d’autant plus criante dans notre Sud-Ouest handicapé par une collecte modeste et géographiquement dispersée. Sans compter que la contractualisation imposée dès ce mois d’avril, la réforme de la PAC en 2013 et la fin annoncée des quotas pour 2015 sont autant de révolutions que le producteur laitier va devoir gérer, le plus souvent dans l’urgence et sans trop de visibilité. Il était donc temps de prendre 5 minutes pour réfléchir ensemble aux orientations à donner à la filière pour les années à venir et aux actions à mettre en œuvre pour développer une production moderne, compétitive et surtout rémunératrice. Vaste chantier sur lequel se sont penchés de nombreux intervenants tout au long de la journée. Retour sur un colloque dense et parfois très animé…

Trouver le système qui fonctionne

Essentiellement tournée vers l’information technique, la matinée a permis de faire le point sur les différents systèmes d’exploitation viables économiquement et socialement. Au travers de témoignages d’éleveurs laitiers, plusieurs systèmes de regroupement de moyens ont été présentés. Celui d’Albert Menvielle, du GAEC des Deux Cap à Gardères (65), mettait notamment en évidence les atouts d’un regroupement d’exploitations. Chacun des 3 associés et du 1 salarié à mi-temps a une tâche bien définie (suivi technique du troupeau, cultures, administratif, etc…). Les temps de travaux sont enregistrés et la journée commence systématiquement par un briefing rapide. Ce système leur a permis, non seulement de sortir un revenu correct y compris en 2009, mais aussi d’avoir des conditions de vie et de travail des plus acceptables. « Nous assurons à tour de rôle la permanence de week-end », expliquait Albert Menvielle. « Nous sommes suffisamment équipés pour qu’une personne seule s’en sorte pour la traite. Ça nous ménage donc 2 week-end complets de suite avec nos familles. » Démonstration appuyée par Françoise Huntz du CER France 31, qui présentait un peu plus tard le principe de la Société Civile Laitière. « Il faut favoriser les regroupements d’exploitations laitières pour optimiser les investissements et réduire l’astreinte », plaidait-elle.

Savoir transmettre son exploitation

C’était l’autre sujet d’importance abordé par le CER France. « Commencez à vous en préoccuper dès 45 ans », martelait Françoise Huntz. « Une transmission réussie est une transmission progressive. S’y prendre à la dernière minute, c’est aller droit dans le mur pour vous et le repreneur. » Un conseil qu’aurait bien voulu suivre Daniel Soubiran. Ce laitier, parmi les plus performants de Haute-Garonne, va prochainement cesser la production. S’il intervenait ce matin-là, c’était autant pour présenter son organisation du travail que les motifs qui le poussent à arrêter. Car son exploitation, avec 900.000 l. de quotas, tourne très bien. Mais au moment de sortir de l’EARL, pour raisons de santé, et de transmettre l’exploitation à son fils, trop d’inconnues sont venues faire capoter le projet. « Avec le manque total de visibilité quant au prix du lait et les investissements nécessaires pour remplacer la salle de traite 2×8 de 1982, on a reculé », avoue-t-il. « Malgré des résultats économiques corrects, on ne veut pas prendre de risques. C’est dommage mais c’est comme ça. »
Cette visibilité économique a tout naturellement occupé une large place dans les discussions lors de la table ronde de l’après-midi. La coopérative 3A, Danone et Lactalis représentaient le secteur de la transformation. Cilaisud et la FRPL intervenaient pour la production et le Crédit Agricole apportait la vision des banques. Si tous ont réaffirmé la nécessité de travailler en commun, peu de réponses ont été données aux interrogations sur le prix du lait. Entre les excédents laitiers à gérer (plus d’un milliard de litres rien que pour Lactalis), l’instauration à marche forcée de la contractualisation et une PAC en pleine réforme, la lisibilité n’est pas meilleure pour l’aval de la filière que pour les producteurs. L’objectif de ce colloque n’était, de toute façon, pas de trouver une solution dans la journée. Mais ce dernier a fourni de nombreuses raisons de poursuivre ce type de rencontre. Ce qui n’est pas si mal pour un coup d’essai…

Auteur de l’article : Sébastien Garcia