Les grandes cultures : colonne vertébrale des territoires

Publié le 29 octobre 2011

Initiative intéressante de la FOP, qui a rassemblé la gran

Même discours pour Gérard Tubéry et Xavier Beulin : À nous de bousculer nos politiques pour faire de nos atouts régionaux des avantages concurrentiels.
Même discours pour Gérard Tubéry et Xavier Beulin : À nous de bousculer nos politiques pour faire de nos atouts régionaux des avantages concurrentiels.

de famille des céréales et oléoprotéagineux le 18 octobre à Toulouse, le temps d’un colloque consacré aux liens entre ces filières et les territoires. Le choix de la région Midi-Pyrénées était symbolique, puisque l’agriculture et l’agroalimentaire y sont les premiers pourvoyeurs d’emplois, devant l’aéronautique. Pour le Président de la FOP, Gérard Tubéry, c’était l’occasion de faire un point sur les atouts et faiblesses des grandes cultures, dans un contexte de négociations de la future PAC. C’était aussi le moyen de faire passer quelques messages aux politiques sur les besoins de soutiens réglementaires et structurels pour accompagner ces filières. Acteurs de la production et de la transformation, responsables syndicaux et politiques, sont venus débattre des enjeux a

limentaires, énergétiques, sociaux et environnementaux qui attendent l’Europe.

Des filières bien implantées

La matinée a commencé avec une table ronde sur l’impact des productions sur le développement économique,

social et environnemental de nos territoires. Que ce soit le blé dur avec Jean-François Gleizes (AGPB), le maïs avec Henri-Bernard Cartier (AGPM), le tournesol oléique avec Jean-Philippe Penet (SAIPOL*), ou le soja bio avec Nicolas Lecat (Agribio Union**), le constat est le même. La force (ou la faiblesse) de ces productions réside leur capacité à intégrer tous les échelons de la filière dans une même démarche. « Le temps du simple savoir-produire est révolu depuis longtemps », complétait Étienne Barada, Président des JA Midi-Pyrénées. « Aujourd’hui, le savoir-vendre est tout aussi important. D’où la nécessité d’interagir entre production, transformation distribution. » Aller chercher des nouveaux marchés, les développer et innover étaient les maîtres-mots des intervenants. « Nous sommes le 2ème producteur européen de blé dur », rappelle Jean-François Gleizes. « Le Maghreb est un marché énorme, juste à nos portes et complètement dans nos cordes, à condition de continuer à leur proposer des variétés adaptées à leurs besoins et d’être capable d’assurer des volumes en croissance constante. » La recherche et l’industrie sont tout aussi importantes aux yeux de Jean-Philippe Penet : « L’arrivée du tournesol oléique a marqué un tournant pour les débouchés alimentaires et énergétiques, avec des sous-produits de trituration à gros potentiel économique (tourteaux). Mais si la filière marche, c’est parce qu’on a la maîtrise de l’outil industriel en aval avec le groupe Sofiprotéol (Lesieur, Diester industrie, Oleon, Glon Sanders,…). » C’est peut-être ce qui va permettre à la filière Soja bio de décoller. Nicolas Lecat annonçait, de fait, la prochaine mise en place d’une unité de trituration de soja bio dans le Lot-et-Garonne, pour contrer le quasi monopole de l’Amérique du Sud en matière d’alimentation animale. « Le soja est une petite filière, mais qui présente l’avantage d’apporter des protéines, de compléter les assolements et de répondre aux obligations de baisse des intrants, » ajoutait Etienne Barada, « Mais pour la relancer, il faut que les rendements progressent pour que les agriculteurs s’engagent. La recherche a boosté le tournesol, il faudra faire de même pour le soja. » De son côté, Henri-Bernard Cartier rappelait que la recherche est également à l’origine de la révolution des maïs hybrides. « Ce maïs si décrié dans la presse a tout de même sauvé l’élevage, cette année », soulignait-il. « Sans lui, la pénurie d’aliment aurait été catastrophique. Il faut réhabiliter cette production qui permet, en irrigant, d’installer et de maintenir des agriculteurs sur des exploitations de taille moyenne et donc de faire vivre les terroirs. Et là aussi, l’avenir dépendra de l’innovation. Mais vu le contexte de méfiance à l’égard de la science, on a de quoi avoir des inquiétudes. » Et c’était bien un des buts de ce colloque que d’exposer les contraintes et obstacles rencontrés par ces filières dans leur développement.

Principe d’innovation contre principe de précaution

La présence à la 2ème table ronde de Jean Bizet, sénateur et Président de la Commission des Affaires Européennes au Sénat, et de Vincent Labarthe, Vice-Président du Conseil Régional Midi-Pyrénées, tombait donc à point nommé. Attendus tous les deux sur les questions de l’irrigation et des biotechnologies, Jean Bizet a recueilli l’approbation du public par ses positions en faveur d’une recherche scientifique libérée de l’irrationnel. « Je ne connais pas de pays qui entre dans l’avenir en marchant à reculons », assénait-il. « Les politiques, de droite ou de gauche, sont sans courage sur ce dossier. Il faudrait pourtant inscrire le principe d’innovation dans notre constitution, si on ne veut pas voir la recherche déserter définitivement notre pays. Et les brevets qui vont avec… » La position était plus délicate pour Vincent Labarthe, pour qui les biotechnologies mettraient en danger les productions sous signe de qualité, du fait d’une dissémination possible. « L’agriculture est une chance pour notre région, que ce soit en termes d’emplois, de variété de paysage et de qualité de vie », expliquait-il. « Ces productions de qualité doivent être soutenues et protégées. C’est ce que fait la région au travers d’accompagnements financiers et structurels d’exploitations ou de filières. » Complexité réglementaire, limitation des moyens de production (irrigation, Écophyto, …), une bonne partie des contraintes dont souffre l’agriculture a été passée en revue, tant par les intervenants que par la salle. « Les décisions de Bruxelles sur le verdissement de la PAC sont de véritables sanctions à la production et la France en remet systématiquement une couche supplémentaire quand les règles arrivent chez nous », tempêtait Christian Pèes, Vice-Président du COPA-COGECA***. « L’arrivée du Parlement Européen dans le processus décisionnaire est également un problème. Nos parlementaires sont loin d’être au fait des enjeux de l’agriculture. » Un constat confirmé par Jean Bizet qui regrettait le manque de lobbyisme de la France à Bruxelles et notre trop grande « naïveté » dans les négociations commerciales par rapport à nos voisins anglo-saxons, beaucoup plus agressifs. « Nous avons un vrai devoir d’éducation de nos représentants », résumait Christian Pèes.

Une mission que compte mener Xavier Beulin, Président de la FNSEA et administrateur FOP. Ce dernier concluait d’ailleurs la matinée en estimant que la France avait au moins autant besoin de sociologues que de chercheurs, pour faire comprendre l’agriculture à ses concitoyens. « Dans les discussions qui nous attendent sur la future PAC, nous devrons davantage monter au filet pour montrer que l’agriculture amène de la richesse et de l’emploi aux territoires, en plus de sa fonction, trop souvent oubliée, de nourrir les populations. »

S.G.

* Société Agro-Industrielle de Patrimoine Oléagineux : Société du pôle Valorisation des oléagineux de Sofiprote?ol, Saipol assure la première transformation des graines en huiles et tourteaux destinés a? l’alimentation humaine, la nutrition animale, les énergies et la chimie renouvelables.
** Union des 5 coopératives (Agribio, Arterris, Euralis, Terres du Sud et Vivadour) spécialisée dans les grandes cultures bio en Midi-Pyrénées et Aquitaine.
*** Le Comité des Organisations Professionnelles Agricoles et le Comité Général de la Coopération Agricole regroupent les organisations syndicales et professionnelles agricoles de l’Union Européenne.

Auteur de l’article : Sébastien Garcia