Opération Séduction pour le Veau sous la mère

Publié le 19 novembre 2011

Le « speed dating », vous connaissez ? Ces rencontres express où, dans un même lieu, des célibataires enchainent des rendez-vous entre eux, avec 7 mn pour convaincre (ou pas) l’autre de se revoir font fureur depuis quelques années. L’association « Veaux sous la Mère » a décidé de suivre plus ou moins le même concept pour attirer de nouveaux éleveurs, qu’ils soient encore étudiants ou professionnels à la recherche de diversification. Avec son opération « 4 heures chrono Installation », l’association VSLM proposait, dans tout le grand Sud-Ouest, une découverte originale de cette production et de ses atouts, chez un éleveur, en compagnie de tous les acteurs de la filière, de l’installation à la distribution. Pour la Haute-Garonne, c’est Cédric Dinnat, éleveur à Montbernard, qui a mis son exploitation à disposition pour la journée. Alors que la matinée a vu défiler des éleveurs de la région, l’après-midi était réservée aux élèves des lycées agricoles de Saint-Gaudens et de Mirande. Même schéma pour ces 2 x « 4h chrono » : une vidéo de présentation de la production VSLM, suivie du témoignage d’éleveurs « parrain », en l’occurrence Dominique Lacaze, Jean-Claude Caubet et Nicolas Fortin, puis enfin les interventions des partenaires (Elvéa 31, Synergie, Veau Fermier du Lauragais, Chambre d’Agriculture 31, Point info installation 31 et 32, Service de remplacement, CER France et banques).

Des atouts à revendre

Le moins qu’on puisse dire, c’est que la production de Veaux sous la Mère ne manque pas d’arguments. « Le revenu dégagé à l’hectare ou à la vache est le plus élevé de toutes les productions allaitantes et ce, dès la première année », précise Francis Rousseau, animateur de l’association Veaux sous la Mère. « Cette production est aussi économiquement très stable. Les débouchés et les prix sont peu sensibles à la conjoncture ou au contexte international. Nécessitant peu d’investissements et adaptée aux exploitations de petite et moyenne tailles, c’est vraiment la production idéale pour débuter. Mais c’est également une très bonne option pour diversifier son activité pour les périodes printemps et hiver, en complément d’une activité de broutards en été-automne, par exemple. » La bonne tenue de cette production tient en quelques mots : la demande en viande de veau fermier élevé sous la mère dépasse largement l’offre actuelle. « Le veau sous la mère donne une viande de haut de gamme, unanimement reconnue comme une des plus prestigieuses par les gastronomes », poursuit Francis Rousseau. « Il y a donc un réel marché et la demande augmente de 3 à 4.000 veaux par an. Autant dire que les débouchés – et les revenus – sont assurés ! » Pourtant, malgré ces avantages, la filière manque de producteurs.

Le Veaux sous la Mère recrute !

On dénombre 6.000 éleveurs de veaux sous la mère dont 4.500 engagés dans une filière de qualité organisée Label Rouge. 70.000 veaux sous la mère sont produits chaque année, 50.000 d’entre eux le sont sous cahier des charges Label Rouge. Mais depuis quelques années, le veau de lait sous la mère est confronté à un problème de déficit de production pour approvisionner un marché en extension. Cette pénurie de produit est particulièrement aigüe durant l’hiver, période où la production est au plus bas, alors que la consommation de viande de veau est à son plus haut niveau. Plus inquiétant, la pénurie s’accentue d’année en année en raison d’une baisse structurelle de la production (de -3% à -5% par an). De fait, le nombre d’installations de nouveaux éleveurs est insuffisant pour compenser les départs en retraite d’éleveurs âgés. « Il y a de la place aujourd’hui pour au moins 1.000 à 1.500 nouveaux éleveurs que la filière et ses organisations de producteurs sont prêtes à accueillir », insiste Francis Rousseau. « Il faudrait que nous installions une centaine d’éleveurs par an pour fournir le marché en quantité suffisante. Or, la filière n’en installe que 70… »

Une production exigeante mais qui se modernise

Comment expliquer alors ce manque de « volontaires » ? Pour Cédric Dinnat, qui vend une grosse vingtaine de veaux Label Rouge par an, les causes sont à la fois techniques et structurelles. « Techniquement, la principale contrainte est l’astreinte », explique-t-il. « La tétée des veaux matin et soir, 365 jours par an, peut rebuter pas mal de candidats. De ce côté, il y a tout de même eu de gros progrès en termes de techniques d’élevage et de conditions de travail, comme la tétée en libre service, le désaisonnement ou encore le recours au Service de Remplacement ou aux groupements d’employeurs. Mais il faut être objectif, c’est une production qui exige une surveillance constante et une bonne technicité. Il faut bien maitriser la reproduction pour avoir un veau par vache et par an, et veiller à toujours avoir une bonne conformation des veaux, avec une couleur de viande la plus claire possible et un état d’engraissement suffisant. Les erreurs se traduisent par une baisse de la qualité de la viande et ça, c’est tout de suite pénalisé par le boucher ou le négociant. Le Label Rouge, s’il nous aide beaucoup à bien valoriser notre produit, nous impose une qualité irréprochable. » C’est en grande partie à cause de ces contraintes que le Veau sous la Mère a eu du mal à faire des adeptes, surtout à l’époque où le marché de la viande et les exportations de broutards se portaient bien. « On nous a souvent considérés comme esclaves de notre production », reconnaît Cédric Dinnat. « Mais on s’est accrochés. L’association Veaux sous la Mère a fait un énorme travail de recensement et d’analyse des élevages les plus performants pour voir comment améliorer et optimiser la production. Ça a tiré la filière vers le haut et le résultat se voit aujourd’hui. »

Un résultat que l’association comme les éleveurs présents étaient fiers de présenter aux visiteurs, lors de cette journée originale. En espérant que leur enthousiasme soit contagieux…


Le saviez-vous ?
Un Veau sous la Mère est un jeune animal de boucherie élevé au lait naturel. Nourri au lait, il tète deux fois par jour directement au pis de sa mère ou de tantes. Il est ensuite abattu entre 3 et 5,5 mois d’âge, à un poids carcasse pouvant aller de 85 à 170 kg. Sa viande claire infiltrée de gras est tendre, juteuse et goûteuse.

Auteur de l’article : Sébastien Garcia