Une plateforme pour développer le blé dur

Publié le 17 février 2013

« Les Journées Blé Dur sont devenues un passage obligé pour toute la filière », se félicitait Jean-François Gleizes, Président du Comité de Pilotage de la Filière Blé Dur. C’est un moment important pour se poser, réfléchir ensemble et définir nos axes d’actions à venir. » Tenue pour la 4ème fois de son histoire à Toulouse, la 15ème Journée blé dur du 7 février dernier à Labège a été l’occasion, pour les acteurs de cette filière importante pour notre région, de faire le point sur l’évolution du marché du blé dur, notamment les conséquences de la fin du Canadian Wheat Board (CWB), l’outil de commercialisation des producteurs canadiens, qui sera remplacé par de grands opérateurs privés et multinationaux. Thème important de cette journée, plusieurs interventions étaient consacrées aux impacts du changement climatique sur la production et la qualité du blé dur.

Une production appelée à s’adapter

Cultivé sur plus de 400.000 ha en France, le blé dur représente une filière structurée et performante, contribuant au maintien de l’emploi, souvent en zone rurale, et répondant aux attentes des consommateurs français. Par l’exportation des 2/3 de sa production de grains, cette filière apporte ainsi une contribution significative à la balance commerciale du pays. Savoir comment cette production va aborder les décennies à venir et les changements climatiques qui s’annoncent est donc une question qui méritait sérieusement qu’on s’y attarde. Pour Jean-Claude Deswarte, d’Arvalis-Institut du Végétal, les scenarii envisagés laissent présager une précocification de la culture. « Le blé dur va pouvoir esquiver une partie du stress de fin de cycle », note-t-il. « Il y aura un peu moins d’échaudage et de stress hydrique, puisque le cycle se terminera plus tôt en saison, à une période légèrement plus fraîche. » Autre impact de ces variations climatiques, un déplacement des zones de production plus au nord, où le froid est, pour le moment, un handicap pour la culture de blé dur. « Les enjeux seront multiples », estimait-il. « Il faudra travailler sur des variétés plus précoces et plus résistantes au stress hydrique. Il faudra aussi faire évoluer les conduites de culture, en tenant davantage compte des prévisions climatiques. Prévisions qu’il faudra rendre encore plus pertinentes et précises, en développant de nouveaux outils, capables d’anticiper de plus en plus tôt, les variations météorologiques. »

Autre inconnue pour l’avenir du blé dur, la réglementation et les soutiens européens. Sur ce sujet, Jean-François Gleizes a renouvelé son souhait de voir le blé dur conserver sa spécificité dans la future PAC. « Mais c’est aussi à la filière de se prendre en main », insistait-il. « Nous avons obtenu une 1ère avancée majeure avec la certification de nos semences, dossier porté par l’association Blé Dur Méditerranée. Nous continuons avec la création de Durum, notre coopérative spécialisée dans le négoce international du blé dur. » Fruit du partenariat entre Arterris et Axéréales, cet outil devrait permettre de positionner une grande partie de la production française sur un marché très concurrentiel, dominé par les États-Unis et le Canada. « C’est le plus gros évènement pour notre filière depuis 20 ans », soulignait Jean-François Gleizes.

Une plateforme révolutionnaire

Jean-François Gleizes (à gauche) aux côtés de Jacques Mathieu (Arvalis) et Christian Huyghe (INRA), les deux Présidents de la nouvelle plateforme Blé Dur.
Jean-François Gleizes (à gauche) aux côtés de Jacques Mathieu (Arvalis) et Christian Huyghe (INRA), les deux Présidents de la nouvelle plateforme Blé Dur.

 

La journée a aussi été l’occasion d’annoncer officiellement le lancement d’une Plateforme Blé Dur, dont les acteurs de la filière attendent beaucoup. « Tout ce qui est produit en blé dur est transformé », rappelait Jean-François Gleizes. « Il est donc impératif que toute la filière soit structurée et avance dans la même direction. Nous avons des marges de progrès à réaliser à toutes les étapes. Encore faut-il que nous sachions les identifier et y apporter des solutions sans faire de doublons ou nous faire concurrence entre différents intervenants. » C’est la raison pour laquelle, pour la première fois, l’ensemble des parties prenantes de la filière s’est fédéré autour d’un outil nouveau, qui rassemble les sélectionneurs, les producteurs, les coopératives, les industriels, FranceAgriMer, les acteurs de la recherche (INRA), de la recherche appliquée (Arvalis, ACTIA) et de l’enseignement supérieur.

Cette plateforme unique est co-présidé par Christian Huyghe, Directeur Scientifique Adjoint « Agriculture » de l’INRA, et Jacques Mathieu, Directeur Général d’Arvalis. Les axes de travail identifiés visent à développer une production compétitive et de qualité au travers de deux logiques. Une logique d’agroécologie, d’une part, pour une production agricole performante, et une logique d’éco-conception, pour élaborer des produits répondant aux attentes des consommateurs. D’ores et déjà, des actions de recherche sont engagées et de nouveaux projets de recherche, au niveau national et européen sont en cours de dépôt. « Nous sommes au seuil d’un grosse révolution, qui concerne des champs aussi variés que la génomique, les process industriels, les auxiliaires de culture, etc… », déclarait Christian Huyghe. « Il faut donc mobiliser toutes les forces vives en notre possession, dans tous les domaines : agronomie, biologie, climatologie, économie, informatique, sciences sociales, … Le mot-clé de cette plateforme est définitivement le décloisonnement. »

Auteur de l’article : Sébastien Garcia