Inoculation du soja : produits et usages

Arnaud Micheneau – Terres Inovia

 Contacts régionaux : Vos contacts régionaux Arnaud Micheneau (a.micheneau@terresinovia.fr) – Sud Nouvelle Aquitaine, Gers, Hautes-PyrénéesQuentin Lambert (q.lambert@terresinovia.fr) – Occitanie

La capacité du soja à fixer l’azote atmosphérique est une caractéristique des plantes de la famille des légumineuses et c’est un avantage agro-économique notoire. Pour garantir le bon fonctionnement de la symbiose plante-rhyzobium responsable de ce mécanisme, il faut utiliser un produit inoculant de qualité et respecter les modalités d’usage. Terres Inovia fait le point.

Un peu d’histoire …

Jusqu’au début des années 80, l’inoculation du soja en France était réalisée avec un produit à base de rhyzobium USDA138. Les travaux réalisés sur cette souche de rhyzobium ont alors fait apparaitre un risque portant sur la difficulté potentielle à remplacer cette souche dans les sols, au profit d’autres souches plus performantes, si besoin en était dans un futur plus ou moins proche. Pour éviter cette situation, une nouvelle souche a été sélectionnée par l’INRA (Bradyrhizobium diazoefficiens G49), à la fois pour sa capacité à noduler avec les variétés conduites en France, mais aussi sur sa facilité à être remplacée par une nouvelle souche si nécessaire. Une approche basée sur une logique de réflexion à long terme. Rappelons par ailleurs que les variétés inscrites en France sont inoculées avec cette souche au cours des étapes de sélection.

 A l’inverse, d’autres pays comme le Brésil, après avoir intégré dans leurs sols une grande diversité de souches, a dû sélectionner des souches plus agressives (ex : SEMIA 5079 & SEMIA 5080) pour permettre leur installation dans ces mêmes sols. Un choix qui rend aujourd’hui difficile la possibilité de remplacer ces souches en cas de problèmes, par exemple une perte de leur capacité à noduler à la suite d’une mutation.

Votre parcelle at-elle besoin d’être inoculée ?

La bactérie nécessaire à la fixation symbiotique de l’azote atmosphérique étant naturellement absente des sols français pour le soja, doit être apportée par inoculation au semis. Cette étape doit être réalisée lorsque la parcelle n’a jamais porté de soja ou lorsque l’on veut sécuriser la mise en place des nodosités (sols calcaires, sols sableux, ou parcelles n’ayant pas porté de soja depuis de nombreuses années).  Une fois introduite, la bactérie survit bien dans les sols et la ré-inoculation est souvent inutile. 

Plusieurs types d’inoculum et de nouvelles souches sont commercialisées :  les recommandations de Terres Inovia 

De nouvelles modalités d’inoculation sont aujourd’hui possibles grâce à une diversification de l’offre en type d’inoculum : tourbe sur graine, tourbe sur micro-granulés, tourbe plus additif collant, liquides, et semence pré-enrobées. Au-delà des procédés, la nature de la souche de la bactérie (rhyzobium) est un élément majeur à prendre en compte, d’autant plus qu’aujourd’hui les souches utilisées dans les produits commercialisés n’offrent pas toutes le même niveau de qualité. 

La qualité du produit, quelles sont les garanties à rechercher ?  Un produit de qualité est un produit garantissant la concentration en bactéries, la nature et les propriétés de la souche utilisée, l’absence de contaminants extérieurs. Le système de licence mis en place par l’INRA depuis 40 ans offre ces garanties. Chaque année, l’INRAE fournit la souche aux industriels, contrôle des échantillons des productions, et revérifie à postériori l’aptitude à former des nodosités et à fixer l’azote du produit.  Ce travail est une garantie très importante pour l’utilisateur-agriculteur.

TERRES INOVIA recommande donc clairement l’utilisation d’inocula fabriqués avec la souche sélectionnée G49 et relevant du dispositif de contrôle qualité INRAE. Néanmoins depuis quelques années, les mécanismes de reconnaissance mutuelle, entre états européens, des autorisations de mise sur le marché permettent à d’autres inocula d’être commercialisés. Terres Inovia les déconseille absolument. Outre l’absence de garanties liées à un contrôle qualité, certains produits sont fabriqués avec des souches inconnues ou connues pour leurs inconvénients. Une souche indésirable survit en général bien et ne pourra plus par la suite être remplacée. Les inocula à éviter sont BIOFIX IN et LIQUIFIX.  (voir tableau ci-dessous : produits sur le marché et recommandations -janv.2022)

Semences pré-enrobées : une solution pratique qui a ses limites. Les semences préenrobées évitent de procéder à l’inoculation et donc sont pratiques pour le producteur, Les comparaisons réalisées entre le Force 48 au semis et le pré-enrobage avec Hicoat Super montre un avantage au Force 48 à base de G49 (figure 1). Cet avantage se retrouve plus particulièrement sur le nombre moyen de nodosités par plante et sur la teneur en protéines (+0.7 point de protéines pour Force 48). Les performances rendement sont relativement proches, à l’avantage de l’inoculum à base de G49 (+1.2 q/ha). Sur le critère du nombre de nodosités par plante, remarquons également un écart entre Hicoat pré-enrobé à 90 jours avant semis contre 30 jours, a l’avantage du délai réduit. L’utilisation de ce procédé sera à réserver aux situations ayant déjà porté un soja.  
Attention, un inoculum est un produit biologique fragile, prenez des précautions. Après achat, le produit inoculant ou les semences pré-inoculées doivent être conservés à température fraiche et à l’abri de la lumière, pour en conserver la qualité. L’inoculation peut se pratiquer de plusieurs façons.

Apporter de l’azote au semi ? décryptage d’une fausse bonne idée

« Un apport d’azote au semis sera-t-il bénéfique à mon soja en accélérant son démarrage ? ». La réponse est non : pourquoi ?  Sur le plan technique, rappelons que le point fort d’une légumineuse telle que le soja, est sa capacité à mobiliser l’azote présent dans l’atmosphère : ressource gratuite et disponible en quantité, grâce à ses nodosités. Néanmoins, dans les premières phases de son cycle, alors que les nodosités se mettent en place, le soja va mobiliser une partie de l’azote du sol, avant de basculer en grande majorité sur l’azote atmosphérique par la voie symbiotique, via les nodosités. 

Une quantité d’azote trop importante au début du cycle a alors pour effet de retarder la mise en place de ces nodosités ce qui peut alors pénaliser le soja. Comme le montre la figure 2, on observe une diminution du nombre de nodosités, en lien avec l’augmentation de l’azote disponible dans le sol. Dans une majorité de situations, un apport modéré de 30 à 40 unités ne se traduira pas forcément par un rendement pénalisé, mais le bilan économique est quant à lui négatif, l’investissement en azote n’étant quasiment jamais amorti, en particulier dans le contexte actuel du prix de l’azote.

Figure 2 : Evolution du nombre de nodosité en fonction de la teneur en azote du sol

En règle générale il est donc déconseillé d’apporter de l’azote au semis à un soja, c’est par ailleurs totalement interdit en zone vulnérable. Seule exception, si un défaut de nodulation est observé à l’approche de la floraison, un apport d’azote peut se justifier entre la floraison et la formation des premières gousses, dans la limite de 150 unités. En zone vulnérable, un tel apport n’est possible que dans cette situation de nodulation défectueuse.

La double inoculation réduit-elle le risque de défaut d’inoculation ?

L’inoculation réalisé classiquement avec un inoculum à base de G49 comme le produit Force 48, doit apporter environ 10 fois plus de bactéries par rapport à la concentration minimale requise : soit un million de bactéries par graines contre environ cent milles requises. Toutefois, si les conditions de conservation de l’inoculum ne sont pas respectées, la concentration bactérienne peut facilement diminuer de 10 fois, cent fois, mille fois ou davantage encore. Le fait de multiplier la dose par 2 est donc dérisoire.

Doubler la dose n’a pas d’intérêt : la preuve chiffrée. En situation de bonnes conditions de conservation de l’inoculum : une double dose apportera deux millions de bactéries au lieu d’un million… pour un besoin de seulement cent mille ! En revanche, en situation de mauvaises conditions de conservation, si la concentration est 100 fois plus faible, la double inoculation revient à apporter 20 000 bactéries au lieu de 10000 pour une dose simple : on reste alors toujours nettement inférieur au besoin de cent milles bactéries.

Cette pratique de double inoculation peut être observée dans les cas d’utilisation de semences pré-enrobées avec Hicoat. Souvent moins concentrées en bactérie, on souhaite alors ré-inoculer par sécurité, avec une solution à base de G49. Dans ce cas de figure et sur la même base de raisonnement que précédemment, si une inoculation à la ferme, même à demi-dose est réalisée en plus du pré-enrobage, alors autant privilégier dès le départ une semence non pré-inoculée. En effet le nombre de bactéries apportée par l’inoculation juste avant le semis sera suffisante (dans ce cas privilégier tout de même la pleine dose).

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Auteur de l’article : Rédaction Tup 31