Sivens, l’épilogue ?

Publié le 8 mars 2015

Ça y est. La « Zone à Défendre » de Sivens est à présent vide de ses occupants, au terme d’une folle semaine où la pression entre zadistes et agriculteurs de la FRSEA et des JA Midi-Pyrénées n’a cessé de monter, frôlant plusieurs fois l’explosion. Les forces de l’ordre donc ont procédé à l’évacuation du site le vendredi 7 mars dernier, juste après les annonces de Conseil Général du Tarn. Retour sur 6 longues journées de mobilisation.

Samedi 28 février et dimanche 1er mars

Les riverains tentent de dégager une partie de la D132 (rendue impraticable par les zadistes) et tuent une truie de 250 kg pour ravitailler sur toute la semaine de blocage. Des affrontements ont lieu sur le site avec les zadistes qui essayent d’empêcher le nettoyage. Les forces de l’ordre s’interposent et le nettoyage finit par être effectif.

Lundi 2 mars

Avec les agriculteurs aveyronnais, 100 à 150 personnes se postent sur deux  points de blocage définis par la FDSEA et JA du Tarn. L’objectif de la journée est d’avancer petit à petit les deux points de blocage. Les forces de l’ordre se positionnent entre les agriculteurs et les zadistes pour éviter toute confrontation. La position du Conseil général, qui a tenu une réunion à huis clos, déplait à la ministre de l’environnement, Ségolène Royal. À partir de là, les forces de l’ordre restent sourdes à toutes les sollicitations des agriculteurs pour avancer la position de nos  deux points de blocage.

Mardi 3 mars

Des agriculteurs de toute la région se sont relayés pendant une semaine sur les différents barrages du site de Sivens.

Un bus des Hautes-Pyrénées vient relayer les aveyronnais. 150 à 200 personnes sont maintenant présentes sur les deux points. Les forces de l’ordre sont débordées et on assiste à plusieurs affrontements entre agriculteurs et zadistes dans les bois. Stéphane Lamberto, propriétaire d’une parcelle de bois sur le secteur, et Président FDSEA de Lisle sur Tarn se fait agresser par un zadiste. Il a été conduit aux urgences pour se faire recoudre la main. Au même moment, 30 zadistes font irruption dans les locaux de la FDSEA à Albi. Ils seront expulsés par des agriculteurs revenus en urgence de Sivens pour les déloger.

Mercredi 4 mars

Le Lot et l’Ariège relayent les Hautes-Pyrénées. 200 à 250 personnes présentes sur les  deux points de blocage. Une manifestation de soutien aux zadistes à Gaillac tente de ravitailler la ZAD.  Les agriculteurs l’empêchent et font blocus. La FNSEA prend directement contact avec les ministres du gouvernement. Les zadistes et leurs soutiens se déchaînent sur le standard téléphonique de la FDSEA : insultes et menaces de brûler le bâtiment. Des appels au calme sont lancés par le ministre de l’intérieur et par le Président de la FNSEA, Xavier Beulin. 50 agriculteurs entrent sur la ZAD et commencent à démonter les campements des zadistes. Les altercations sont musclées.

Jeudi 5 mars

Le Gers et la Haute-Garonne prennent le relais. 450 personnes sont présentes. Les deux points de blocage se sont démultipliés en six, car des éléments extérieurs essayent de rentrer. On annonce une évacuation imminente qui n’aura jamais lieu. Les altercations entre agriculteurs et zadistes se multiplient. Les forces de l’ordre laissent finalement les agriculteurs approcher de la ZAD, avant de les forcer à revenir sur leurs positions initiales. Retour à la case départ…

Vendredi 6 mars

La mobilisation est relancée. 200 tarnais sont à nouveau présents. À 12h, le Conseil Général du Tarn vote pour une retenue d’eau redimensionnée sur la zone du projet. Les élus départementaux demandent à l’État qu’il procède sans délai à l’expulsion des occupants sans droit ni titre. À 12h30, FDSEA et les JA lèvent le blocus et se positionnent à la base de loisirs de Salvagnac pour le repas. Quelques minutes plus tard, les forces de l’ordre lancent l’évacuation qui se prolongera une bonne partie de l’après-midi. Quelques zadistes tentent de trouver refuge à Gaillac, d’où ils seront délogés par la police, le lendemain.

À Toulouse, un petit groupe de manifestants anti-Sivens vient taguer les murs de la Chambre d’Agriculture. Les forces de police qui les suivaient à quelques minutes les dissuadent de revenir. Les graffitis seront effacés par la Préfecture dès le lendemain matin.

 

A. RENAULT (Paysan Tarnais) et S.G.

 

Zoom sur…

Le Conseil Général du Tarn vote un compromis

Les conseillers généraux du Tarn, réunis en session ce vendredi 6 mars, ont décidé (43 pour, 3 contre, opposés dès le départ au projet) de retenir un des projets répondant aux conclusions du rapport des experts diligentés par la ministre de l’Environnement, Ségolène Royal. Rapport qui confirme les besoins en eau pour la vallée du Tescou.

 L'Assemblée Départementale a voté pour un Sivens "allégé".
L’Assemblée Départementale a voté pour un Sivens « allégé ».

Le projet de territoire, susceptible de maintenir des exploitations de taille familiale sur le site et de contribuer au soutien d’étiage du Tescou, repose nécessairement sur un apport en eau, à partir d’un stockage hivernal. Le Conseil Général est donc fondé à poursuivre la réalisation du projet et accepte de redimensionner le projet initial. En effet, l’analyse des éléments du rapport d’expertise permet d’écarter la réalisation de retenues latérales, compte tenu des coûts annoncés et des délais de réalisation. Le projet doit être poursuivi dans les meilleurs délais, puisqu’il est la seule solution pour répondre aux besoins en eau évidents sur ce territoire.

 

Sur proposition du président du Conseil Général, l’Assemblée départementale a statué sur 4 points :

  • la nécessité de réaliser une retenue dans la vallée du Tescou,
  • la retenue d’eau redimensionnée se fera sur la zone de projet,
  • l’exécutif départemental est mandaté pour négocier un protocole transactionnel avec l’État,
  • les élus départementaux demandent à l’État qu’il procède sans délai à l’expulsion des occupants sans droit ni titre.

« Je remercie tous les adhérent(e)s et adhérents FDSEA/JA des départements de Midi-Pyrénées pour leur mobilisation et leur solidarité », dira Roland Le Grand, Président des JA 81. « Chacun(e) d’entre eux (elles) a contribué à la réussite de cette action syndicale. Cette solidarité sans faille de nos réseaux, qui s’est étendue au-delà de la région et à nombre de citoyens, a permis de mettre la pression sur le gouvernement pour obtenir des avancées sur le projet, mais aussi sur l’expulsion du site. La décision du Conseil Général du Tarn permet d’envisager une retenue rapidement dans la vallée. Si la question des volumes n’est pas précisée à ce jour, on estime que le dimensionnement laisse les perspectives ouvertes pour voir de l’eau en suffisance dans la vallée. Tout n’est donc pas totalement fini. Nous restons vigilants sur les suites données et le retour effectif et durable de l’État de droit. »

Auteur de l’article : Sébastien Garcia